To The Moon, mariage subtil entre jeu vidéo et art

to the moon cover

Si vous avez 4 à 5 heures devant vous et que vous voulez vivre une expérience vidéoludique extraordinaire, alors j’ai ce qu’il vous faut.

To The Moon est un jeu de rôle 2D sorti en 2011 et développé par l’équipe de Freebird Games.
Le jeu a connu un succès mitigé lors de sa sortie mais les ventes ont été propulsé lorsqu’il a été proposé sur la plateforme Steam.

J’avais déjà eu de bons retours de la part d’un ami qui m’a conseillé ce jeu et m’avait fait écouter la bande son très très belle, en plus moi qui suis fan de J-RPG je savais que tôt ou tard j’allais le tester ce jeu. Et bien c’est désormais le cas, je l’ai acheté hier et je l’ai fini cet après-midi, cela m’a pris un peu plus de 4 heures, et quelle émotion !

Ce jeu est une vraie claque, mais avant de vous livrer mes impressions il faut savoir qu’il ne s’agit pas vraiment d’un jeu de rôle classique où on fait évoluer des personnages dans des quêtes avec des niveaux à gagner, des sorts à apprendre, des monstres à tuer, un gameplay de ouf etc… Ici, rien de tout ça, les 4 heures de jeu sont passées en immersion totale dans l’histoire, et le gameplay est quasiment inexistant : vous passerez donc la grande majeure partie de votre temps à faire défiler des dialogues et regarder des cinématiques. Le reste c’est du Point & Click basique, avec quelques énigmes parfois, mais jamais la possibilité de « perdre ». (Et donc absence totale de game over) Je sais que cela peut en dérouter plus d’un, mais sachez que le scénario est tellement bien travaillé qu’on oublie rapidement qu’on est en train de jouer, tellement on est plongés dans l’histoire.
Et ceci est véritablement incroyable.

 

to the moon puzzle

Malgré quelques séquences de gameplay anecdotiques, le jeu se déroule tel un film interactif

 

Pour ne pas trop vous spoiler, je vais essayer de décrire rapidement le synopsis du jeu : l’histoire se passe dans un futur plutôt proche, où l’homme aurait maîtrisé la technologie permettant de revivre les souvenirs d’une personne.
L’entreprise Sigmund Corp est spécialisée dans un domaine d’activité très particulier : celui d’aider les personnes mourantes à mourir heureux. Comment ? Tout simplement en « recréant » leurs souvenirs de façon à ce qu’ils aient l’impression d’avoir vécu la vie qu’ils ont toujours rêvé de vivre. Et cela implique évidemment d’accéder à leurs souvenirs, même les plus profonds, afin d’agir dessus et changer le cours des choses. (Toujours artificiellement, bien entendu)

Johnny est un vieil homme (qui a la 80aine on suppose) habitant dans une grande maison sur une falaise, près d’un phare.
Il est mourant, sa femme est décédée il y a peu, et il ne peut plus descendre de son lit. Lily, une veuve cherchant désespérément un endroit où se loger, a été accueilli chaleureusement par le vieil homme et depuis elle s’occupe de lui et vit également à la maison avec ses deux enfants.
Johnny sait que ses jours sont comptés et appelle alors la société Sigmund qui lui envoie deux experts, Watts et Rosalene, qui vont tenter de modifier ses souvenirs afin qu’il puisse mourir en paix.
Son voeu le plus cher ? Aller sur la lune… (d’où le titre du jeu)

 

Watts et Rosalene se préparent à lancer l’expérience et entrer dans les souvenirs de Johnny

 

Voilà en gros la trame principale de l’histoire. Passons maintenant à mes impressions sur le jeu : dès le début, on est plongés dans une ambiance assez triste, mélancolique, avec cette musique de piano (For River) jouée en fond, qui est à la fois douce et nostalgique. On a ce sentiment d’éternité qui plane, comme si une scène de vie venait de se figer à jamais dans notre esprit.

To The Moon c’est un jeu dont le déroulement sort des normes habituelles, puisqu’au lieu de mettre en scène une suite chronologique d’événements, c’est le contraire qui se passe car 90% du jeu se déroule dans les souvenirs de Johnny et on remonte sa vie de la vieillesse jusqu’à l’enfance. Ce choix est de mon point de vue extrêmement bien maîtrisé et émotionnellement beaucoup plus impactant. Le fait de remonter le temps donne un côté suspens incroyable qui fait une des grandes forces du jeu : en effet, dès les premières phases d’exploration de souvenirs on a envie d’en savoir plus sur ce mystérieux personnage qu’est Johnny, et petit à petit on reconstitue les pièces du puzzle qui nous révèlent la vraie raison de son souhait d’aller sur la lune. Les rebondissements sont simples, mais étonnamment bien mis en scène.

Les développeurs du jeu n’ont négligé aucun aspect de ce point de vue là : les personnages sont travaillés au peigne fin, la bande sonore se marie extraordinairement bien avec les cinématiques (je pense que c’est l’un des meilleurs mélanges bande son/cinématique que j’ai pu voir dans tout jeu ou film confondus) et l’émotion arrive à chaque fois qu’on apprend quelque chose sur le personnages où qu’on revit un de ses moments.

J’ai été tellement ému en fait que je me suis véritablement imprégné ces moments là, comme si je les avais moi-même vécues, et je ressens vraiment de la peine, ou de la joie, quand les moments forts arrivent. Et ça c’est digne d’un grand jeu.
Les dialogues sont également impeccables, alternant entre poésie, humour, et tragédie. Pas une phrase n’est de trop, tout est extrêmement ficelé et cohérent avec le scénario, on ne s’ennuie pas une seconde.
Niveau graphisme, même si c’est de la 2D c’est de la 2D vraiment léchée, on voit que les développeurs ont mis l’accent sur les détails, notamment au niveau des jeux de lumière, des animations, tous impeccables.
Par ailleurs, avec la 2D (et le pixel art utilisé ici notamment) on a toujours ce côté rétro qu’on ne retrouve nulle part ailleurs, et qui parvient à créer un univers et une ambiance vraiment atypique, qui moi me rappelle personnellement quelques grands titres de J-RPG (Chrono Trigger, Golden Sun, etc…) même si là c’est un tout autre univers.
J’encourage d’ailleurs fortement les développeurs (indépendants notamment) à faire plus de jeux 2D rétro de ce genre, avec beaucoup de cinématiques et où l’accent est mis davantage sur l’histoire que sur le gameplay.

 

On revit les souvenirs qui ont marqué Johnny,
dont l’apparence change à chaque période clé de sa vie

 

Quant à la musique je ne reviendrai pas là-dessus, je pense que c’est clairement LE gros point fort du jeu, et bien qu’il s’agisse pratiquement toujours du même thème celui-ci est joué à chaque fois d’une façon différente, selon le contexte de la scène, ce qui fait qu’on a l’impression de le redécouvrir à chaque fois sous un nouvel angle. De plus, les effets sonores sont également géniaux, et notamment j’ai été vraiment captivé par celui joué lors des phases de grosses tensions dans le jeu, (je ne spoilerai pas évidemment) qui parvient à nous scotcher encore plus à l’histoire.
Vous l’aurez compris, To The Moon DOIT être joué d’une seule traite, sans interruption, sinon on perdrait vraiment beaucoup le côté immersif et émotionnel que procure le jeu.

Enfin, l’autre chose que j’ai beaucoup apprécié dans ce jeu, c’est réussir à rendre des moments simples de la vie très forts émotionnellement, mais s’ils sont si touchants c’est simplement parce qu’ils sont véritables, sincères, purs, sans artifice.
To The Moon c’est une poésie de la vie, une ode à la vie, un retour en arrière dans un monde où tout était plus simple, où les gens pouvaient vivre « sans technologie » et être heureux et épanouis, où des histoires d’amour extraordinaires comme celle entre Johnny et sa femme ont pu exister.

C’est vrai que parfois quand je regarde le monde d’aujourd’hui j’ai l’impression que tout est tellement effréné, les gens sont pressés, stressés, trop rationnels, réfléchissent trop, on consomme, on en veut toujours plus et en grande quantité, on est de moins en moins patients, tout devient de plus en plus uniforme, tout devient de plus en plus superficiel, y compris nos rapports aux autres comme à nous-même.
En jouant à To The Moon on se libère de tout ça, on s’échappe vers une autre réalité, dans laquelle on redécouvre le monde, un monde plus classique mais où les choses sont belles, singulières, véritables, et profondément humaines. C’est un zoom sur l’intimité de la vie, de la simplicité, c’est un retour à l’authenticité.

Evidemment, il est difficile de ressentir tout ce que je viens de dire sans avoir joué au jeu, c’est pourquoi je vous conseille dès maintenant de l’acheter et de vous plonger dedans, ne serait-ce que pour changer de votre routine habituelle, par exemple?
Vous verrez, ces quelques heures suffisent pour se reconnecter avec nos émotions les plus enfouies. ;)

A bon entendeur et surtout, Good Game !

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